les sept péchés capitaux
Kurt WEILL (1900-1950)
Texte de Bertold Brecht (1898-1956)
Die sieben Todsünden (Les Sept Péchés capitaux)
Version pour 15 instrumentistes de HK Gruber et Christian Muthspiel
Jacques Osinski, mise en scène
Marion Lévy, chorégraphie
Nathalie Pérez (Anna)
Noémie Ettlin (Anna 2)
Manuel Nunez-Camelino(Frère 1)
Camille Tresmontant(Frère 2)
Guillaume andrieux (Père)
Florent Baffi (Mère)
Yann Chapotel, scénographie et vidéos
Catherine Verheyde, lumières
Hélène Kritikos, costumes
Marie Potonet, dramaturgie
Benjamin Lévy direction musicale
Orchestre Régional de Normandie
Mentions partenariat :
Une production L’Aurore Boréale
En coproduction avec le théâtre de Caen et avec l’Orchestre Régional de Normandie, producteur délégué pour la Normandie
plus d’informations
à propos du projet
Note d’intention de Jacques Osinski, metteur en scène
Il y a dans Les Sept péchés capitaux de l’ironie et du courage. L’oeuvre s’est écrite dans l’urgence à Paris en 1933, à un moment où tout va mal. La crise est là. Hitler a été élu, le Reichstag incendié. Brecht et Kurt Weill sont tous deux exilés. En quinze jours, Brecht écrit un texte qui sera mis en musique par Weill alors qu’en Allemagne les nazis brûlent ses livres dans les autodafés. Ce sera son seul ouvrage écrit en cette année où le monde bascule.
« Ma soeur et moi, nous venons de Louisiane
Où les flots du Mississipi roulent sous la lune
-vous devez le savoir, tant de chansons l’ont dit. »
Ainsi commence l’histoire. J’aime cette façon de d’emblée poser les codes : Nous sommes en terrain connu. L’histoire qui va se raconter est celle que le public attend, une histoire qu’on a racontée cent fois : celle de la jeune fille pauvre et pure dévoyée par la société. C’est celle de Lulu de Wedekind, celle de tout un tas de bluettes de l’époque aussi. Et il y a comme un plaisir de petit enfant à se faire raconter à nouveau cette histoire, toujours la même histoire. Ce plaisir Brecht et Weill ne le boudent pas. Mais ils osent le pervertir. L’héroïne y est dédoublée : deux soeurs s’appellent toutes deux Anna. L’une donne les ordres, l’autre les exécute. En réalité, elles ne font qu’une. Parcourant unes à unes les grandes villes d’une Amérique fantasmée, comme sortie d’un décor de cinéma, Anna 1 pousse Anna 2 vers toujours plus de turpitude pour gagner l’argent qui leur permettra de construire la maison que leur famille attend, en Louisiane. Pendant ce temps, leur famille, incarnée par quatre voix d’hommes férocement drôles, s’impatiente et récrimine. Nulle autre voie vers le salut que celle de l’argent. Le titre complet de l’oeuvre est Les Sept péchés capitaux des petits bourgeois et c’est bien à cette classe sociale que Brecht s’en prend, à ceux qui admettent la loi du plus fort et à la bénédiction du clergé qui couvre toutes les compromissions d’un voile bienséant.
Tout le livret est bâti sur un procédé parodique. Comme il l’avait fait auparavant dans son recueil de poèmes, Les Sermons domestiques qui parodiait les recueils de cantiques où le fidèle pouvait trouver des chants appropriés à chacune des circonstances de la vie, Brecht s’amuse dans Les Sept péchés capitaux à raconter avec un anticléricalisme impitoyable, insolent et joyeux, comment, poussée par Anna 1, Anna 2 évite chacun des péchés (la paresse, l’orgueil, la colère, la gourmandise, la luxure, l’avarice, l’envie) pour en commettre d’autres bien plus monstrueux avec la bénédiction de tous. « Qui s’oppose à l’injustice/ Se fait partout mettre dehors/Qui se met en colère à la vue des sévices, / Mieux vaudrait pour lui être mort. » chante Anna 1 avant de vanter la façon dont elle a « guéri » sa soeur du péché de « colère » qui lui avait fait prendre la défense d’un animal maltraité : « Je l’ai guérie de flétrir en public l’injustice./ ça se paie vraiment trop cher. »
Nous sommes en 1933 et Brecht fait un constat : l’injustice triomphe et personne n’ose s’opposer à elle.
Nous sommes maintenant en 2019 et il arrive à beaucoup d’entre nous de regarder l’ombre de l’année 1933 avec inquiétude. L’insolence du jeune Brecht, j’aimerais la retrouver, retrouver un sens politique oublié, enseveli sous l’imagerie de cabaret berlinois qui colle à la peau des oeuvres de Brecht et Weill. J’ai envie de modernité, de débarrasser l’oeuvre des couleurs criardes du cabaret pour chercher quelque chose de pur, de retrouver l’essence d’une pièce qui, sous des dehors légers, était sans doute comme un cri dans le désert.
Les sept péchés capitaux ont quelque chose de cinématographique. Chant, danse, théâtre s’y entremêlent naturellement pour former une oeuvre complète qui m’évoque un road movie. Je pense aussi aux films de Jim Jarmusch ou à l’étrangeté de David Lynch. Dans une scénographie épurée, j’ai demandé au vidéaste Yann Chapotel de créer des images. Ensemble, nous avons déjà fait plusieurs opéras contemporains (Lohengrin de Salvatore Sciarrino et Avenida de los incas 3518 de Fernando Fiszbein avec l’ensemble Le Balcon ou récemment Le Cas Jeckyll de François Paris avec l’Arcal et, à l’Athénée-Théâtre Louis Jouvet, Into the Little Hill de George Benjamin). J’ai envie que ces vidéos soient comme des images brutes, racontant le fantasme de la ville et la réalité de la route, de l’exil qui fut aussi celui de Brecht et de Weill. Nous ajouterons d’autres « songs » de l’époque, issues de la période parisienne de Weill, qui raconteront cet exil. J’ai envie de dire la simplicité d’une vie aux
prises avec les injonctions de l’existence. En scindant les deux Anna, Brecht oppose la matérialiste Anna 1 à la rêveuse Anna 2. Bien sûr Anna 2 n’a d’autre choix que d’abdiquer dans un monde où le capitalisme triomphe. Mais sans Anna 2, Anna 1 ne serait rien.
Avec le chef d’orchestre Benjamin Lévy, nous avons envie de trouver une forme musicale et théâtrale neuve pour dire l’histoire devenue classique des Sept péchés capitaux. Elle conte le rêve et les compromissions auxquelles on cède pour l’atteindre.
Jacques Osinski
à propos de Benjamin Lévy
Très actif sur les scènes symphoniques et lyriques européennes, Benjamin Levy a été nommé en novembre 2016 directeur musical de l’Orchestre de Cannes – Provence Alpes Côte d’Azur.
Il a récemment été invité par les Rotterdams Philharmonisch, Orchestre de la Suisse Romande, Nederlandse Reisopera (Bizet, Les Pécheurs de Perles en 2015), Théâtre Stanislavski – Moscou (Pelléas et Mélisande de Debussy, Olivier Py) Moscow Philharmonic, Umeå Opera (Suède), Orchestre de Chambre de Lausanne, Radio Filharmonisch Orkest, Radio Kamer Filharmonie, Gelders Orkest, Residentie Orkest – La Haye et Noord Nederlands Orkest. Benjamin vient de débuter une collaboration avec Icelandic Opera (Don Giovanni & Eugene Oneguine en 2016).
En France il a dirigé de nombreuses formations : Orchestre National de Montpellier, Orchestre National d’Ile-de-France, Orchestre National de Lorraine, Opéra National de Lyon, Orchestre Poitou-Charentes, Opéra de Rouen, Opéra National du Rhin, Opéra de Limoges, Théâtre National du Capitole de Toulouse, Opéra de Saint-Etienne, Orchestre National de Lyon, Orchestre Colonne, Orchestre Symphonique et Lyrique de Nancy et Orchestre Lamoureux.
Parmi ses récentes invitations et réinvitations, notons le Nederlandse Reisopera (Le Vaisseau Fantôme en 2018), l’opéra de Tours, l’orchestre Lamoureux, l’opéra d’Amsterdam et de nombreux projets avec l’orchestre de chambre Pelléas en compagnie notamment de Jennifer Larmore et de Sabine Devieilhe.
Benjamin était la «révélation musicale de l’année 2005» pour le syndicat de la critique dramatique et musicale. Il a reçu en 2008 le prix « Jeune Talent – Chef d’orchestre » de l’ADAMI.
Benjamin Levy s’est formé aux CNSM de Lyon (Premier Prix de percussion) et de Paris (Prix d’analyse et classe de direction d’orchestre). Il étudie à l’American Academy of Conducting d’Aspen (Etats-Unis) auprès ainsi qu’à l’Academia Chigiana de Sienne. Benjamin a ensuite été régulièrement l’assistant de Marc Minkowski (Opéra de Paris, Oper Leipzig, Festival de Salzburg). Il a passé deux saisons comme Chef-Assistant des deux Orchestres de la Radio Néerlandaise.
Remarqué avec la Compagnie «Les Brigands», il a défendu avec cet ensemble des pièces rares du répertoire lyrique léger, pour lesquelles il a reçu à deux reprises un Diapason d’Or.
Fondateur de l’Orchestre de Chambre Pelléas il a donné avec cette formation au fonctionnement collégial de nombreux concerts en France et en Europe. Un CD Beethoven enregistré en compagnie du violoniste Lorenzo Gatto et de l’Orchestre Pelléas pour Zig-Zag Territoires, paru récemment, a reçu un accueil unanime de la presse et de la critique.
à propos de Natalie Pérez
La mezzo-soprano française Natalie Pérez a commencé sa carrière comme soprano et fait ses études à la Guildhall School of Music and Drama de Londres, dans la classe de John Evans. Comme jeune artiste, Natalie a été Lauréate de l’atelier lyrique d’Opera Fuoco (David Stern), du Jardin des Voix des Arts Florissants (William Christie, Paul Agnew), ainsi que la Résidence Mozart du Festival d’Aix-en-Provence en 2018.
Elle vient d’obtenir le Premier prix femme en catégorie Opéra du concours de Marmande 2019 en tant que mezzo-soprano.
En 2018, Natalie reçoit le prix de Mélodie Française au concours international d’art lyrique de Vienne en Voix, à Vivonne, elle est également finaliste au concours international de Bordeaux Médoc Lyrique.
A l’opéra, Natalie fait ses début de soliste dans le rôle de Cisseo dans Zanaida de J.C. Bach à la Bachfest de Leipzig avec David Stern et Opera Fuoco. Depuis, elle a incarné La Musica et Euridice (Orfeo de Monteverdi) avec Hampstead Garden Opera, Despina (Cosi fan tutte) avec Opera Fuoco, Sofia (Il Signor Bruschino de Rossini) avec British Youth Opera. Ses rôles incluent également Bubikopf dans Der Kaiser von Atlantis de V. Ullmann avec Philippe Nahon et Ars Nova (mise en scène par Louise Moaty) au Théâtre de l’Athénée, Opéra de Reims et Opéra de Massy, Mademoiselle Silberklang (Der Schauspieldirektor de Mozart )et Tonina dans Prima la Musica de Salieri avec l’Orchestre Philharmonique de Hong Kong (China) et D. Stern, Despina dans Cosi Fanciulli, une création de Nicolas Bacri et Eric-Emmanuel Schmidt, avec Opera Fuoco au Théâtre des Champs-Elysées, Mirtilla dans Damon de Telemann au Theater Magdeburg.
En concert, Natalie se produit régulièrement avec l’ensemble Fuoco e Cenere, ce qui l’amène à chanter entre autres à Miami et Paris (Cité de la musique). D’autres engagements notables incluent la cantate Ino de Telemann avec l’orchestre symphonique de Guangzhou (Chine) sous la baguette de David Stern, la cantate « Apollo e Dafne » de Händel et la serenata « Antonio e Cleopatra » de Hasse avec Musica Viva au Tchaikovsky Hall de Moscou, l’Académie Mozart du Festival d’Aix en Provence, ainsi que la tournée internationale du Jardin des Voix avec William Christie, Paul Agnew et Les Arts Florissants.
Passionnée par le Lied, elle participe à des masterclasses avec Anne Sofie von Otter, Angelika Kirchschlager, Jean-Paul Fouchécourt, Ann Murray, Peggy Bouveret. Et c’est dans le cadre du Franz-Schubert Institut en Autriche qu’elle travaille avec Elly Ameling, Helmut Deutsch, Julius Drake, Bernarda Fink, Tobias Truniger, Robert Holl, Rudolf Jansen, Andreas Schmidt et Roger Vignoles.
Pour sa discographie, Natalie apparaît dans «Berenice, che fai?» avec David Stern, Opera Fuoco, Lea Desandre et Chantal Santon (label Aparté, 5 diapasons); et dans la cantate «Eros et Diane» sur la collection intégrale «Debussy 100» de Warner Classics (avec Jean-Pierre Armengaud et Cyrille Dubois).
Deux enregistrements à venir: Les Vêpres de Cozzolani avec l’ensemble I Gemelli d’Emiliano Gonzalez Toro (mai 2019, Naïve), cantates sacrées d’Augustin Pfleger avec l’Orchestre baroque de Trondheim.
Parmi ses engagements cette saison et la saison prochaine, le Requiem de Mozart mis en scène par Yoann Bourgeois, avec Laurence Equilbey et Insula Orchestra à la Seine Musicale, Stabat Mater de Pergolèse avec l’Orchestre Régional de Normandie, Floreska (Amor Conjugale – Mayr) avec Opera Fuoco au Beethovenfest de Bonn, Bergamo, Sesto (Giulio Cesare) avec le Rundfunkorchester Hannover (dir. S. Stern), Messaggiera (Orfeo) en tournée de concerts avec I Gemelli (dir. E.G. Toro), l’Elixir d’Amour (version jeune public) au Théâtre des Champs-Elysées et à l’Opéra de Rouen, Frasquinella dans La Périchole au Théâtre des Champs-Elysées.
© Ledroit Perrin